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Petits Secrets de Dirigeants – Philippe Girault, Président d’Alternet

Après trois années de crise du covid, nous avons aujourd’hui le recul nécessaire sur la façon dont les entreprises ont appréhendé ces bouleversements. Dans notre rubrique « 𝙋𝙚𝙩𝙞𝙩𝙨 𝙨𝙚𝙘𝙧𝙚𝙩𝙨 𝙙𝙚 𝙙𝙞𝙧𝙞𝙜𝙚𝙖𝙣𝙩𝙨 » nous recueillons le témoignage de différents dirigeants afin d’avoir leur retour d’expérience sur cette crise traversée.

 

Nous avons interviewé Philippe Girault, Directeur Général d’Alternet.

 

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Philippe Girault, je suis président d’Alternet, qui est un bureau d’études techniques.
Nous sommes une équipe de quasiment 65 personnes et nous travaillons dans le monde du bâtiment, sur la réhabilitation et la rénovation d’ouvrages plutôt prestigieux, sur trois segments de marché : dans l’immobilier de bureaux, sur les monuments historiques et dans le monde du retail et des centres commerciaux.

 

Quels ont été les changements les plus importants que vous avez dû entreprendre pour faire face à la crise sanitaire ?

Rétrospectivement, ce que l’on se dit c’est qu’on a subi les évènements de façon soudaine. Et lorsque le 17 mars, on a décidé de proposer à toutes les équipes de quitter les bureaux en étant équipé – ça s’est accéléré mais vu qu’on l’avait anticipé, on a été en mesure, dès le 17 mars, de proposer à nos équipes d’aller se confiner là où ils le souhaitaient, avec des outils mobiles – ce qui nous a permis de continuer à accompagner nos clients sur toutes les phases de conception et d’études.

Rétrospectivement, ça a été une période où l’entreprise a collectivement bien réagit. On a pu mettre en place des calls réguliers (tous les 2/3 jours) pour faire le point sur chacune des opérations et rassurer les équipes.
Et ensuite, c’est vrai que cette période là a permis de continuer à souder le collectif qui était déjà fort.

Les équipes sont revenues assez rapidement dans un contexte de sécurité, pour retrouver cet esprit collectif qui avait été maintenu de façon distancielle pendant presque 2 mois.

Je dirais que c’est une crise qui ne nous a pas stoppés dans la croissance. On a toujours été en croissance depuis 2017.

Et on est sortis forts de cette période de crise. Depuis 2020, le collectif s’est renforcé, les réunions dématérialisées se sont poursuivies, ce qui a permis à nos équipes de mieux gérer leur temps, d’éviter de courir à droite et à gauche en présentiel chez chacun de nos maîtres d’ouvrage.

Et donc 3 ans après, on est contents d’avoir affronté collectivement cette crise. C’était une expérience riche et fructueuse.

 

Quelle est votre plus grande source de satisfaction dans la conduite de votre entreprise ?

La plus grande source de satisfaction c’est d’avoir été capable collectivement de garder de la sérénité et de prendre du recul.
On observait ce qu’il se passait à la télévision : la montée en puissance des cas positifs, les urgences qui commençaient à être engorgées et on ne savait pas jusqu’où on allait aller. On était plus ou moins enfermés chez nous, il fallait se protéger pour aller chercher à manger, donc on était quand même dans un contexte très très particulier.
Et malgré ce contexte anxiogène, ce qui nous a plus c’est le recul de la gouvernance de l’entreprise et la sérénité, qui ont fait qu’on a passé les étapes posément.

Tout le monde est resté embarqué dans l’entreprise. On n’a surtout pas fait de choix de dégraisser pour gagner de la masse salariale, bien au contraire, on a maintenu tout le monde dans l’entreprise. Il y a même des gens qui ont été embauchés au 1er avril, au 15 avril, donc qui ont démarré leur vie professionnelle chez nous en distanciel.
Ce qui m’a le plus impressionné c’est ça : c’est cette clairvoyance, cette sérénité.

Donc In Fine, la trajectoire de croissance n’a pas été perturbée par cette crise.

 

Quels changements du corps social avez-vous pu constater ?

On n’a pas mis en place de charte de télétravail. On a, en toute confiance, laissé les uns et les autres gérer leur temps de façon naturelle.
Et donc aujourd’hui, la plupart des équipes passent entre 3 et 5 jours en présentiel au bureau, comme elles l’entendent.

La délégation de confiance qu’on avait déjà insufflée depuis 2017 s’est accrue, et ça c’est une forme de bien-être avéré pour les équipes.
Ce qui fait qu’aujourd’hui on a globalement un lien social à l’entreprise qui est fort, on n’a pas eu de départ et on continue à embaucher.

Il y a une forme de bienveillance, il n’y a pas de stress lié aux chiffres car au capital il n’y a ni banquier, ni fonds d’investissement, il n’y a que les salariés (ndlr. 91% de salariés actionnaires).

On a construit un contexte qui fait que les gens peuvent se consacrer à ce qu’ils aiment, à leur expertise.

On restaure la cathédrale NotreDame, on restaure le château de Versailles, on restaure le musée du Louvre, on restaure beaucoup d’actifs immobilier de bureau à Paris intra-muros qui sont très sympas.
Donc les équipes travaillent sur des ouvrages sympas, challengeant techniquement, dans un contexte où ils n’ont pas la pression des chiffres, où on leur délègue la gestion de leur temps de travail et leur agenda.
Donc pour l’instant, « we are on the tracks », pour l’instant ça va bien.

 

Quels sont aujourd’hui les 2/3 plus grands défis à relever pour votre entreprise ?

Le plus gros défi, c’est de maintenir ce collectif d’experts, de maintenir et développer ce collectif d’experts, avec un collectif qui partage les mêmes valeurs et le même projet et ceci dans la durée, alors que l’on est dans un contexte de ressources qualifiées pénurique.

Le défi n°2 c’est de se dire : aujourd’hui, en France notamment, on a de la chance l’activité économique reste forte. On est dans une période qui nous est favorable parce qu’on est quand même dans une dimension de transition énergétique qui est extrêmement forte et donc de transformation de tous ces actifs. Donc ça porte naturellement nos métiers et notre expertise.
Donc le deuxième défi c’est de maintenir cette confiance client qui nous a fait grandir depuis une dizaine d’années.

Donc le gros défi pour des dirigeants de PME c’est de préserver, maintenir et développer ces deux actifs là : votre actif de ressources et vos actifs clients.

 

Quelles sont les difficultés auxquelles vous devez faire face ?

La première difficulté, et vous l’avez compris, c’est d’être en mesure d’identifier dans le paysage des ressources qui pourraient intégrer l’entreprise. Et donc notre première difficulté c’est : comment, à terme, conforter votre croissance. C’est ajuster notre difficulté à croître à notre capacité à continuer à accueillir chez nous des gens de talent.

La deuxième difficulté – ce n’est vraiment pas une difficulté – c’est s’adapter à l’évolution sociétale.
La place du travail évolue. Il faut qu’on puisse s’y adapter, et c’est pour cela qu’on laisse une grande liberté dans la gestion de l’emploi du temps des uns et des autres, c’est pour cela qu’on essaye de créer de la convivialité.
Il faut que l’on puisse s’adapter à l’évolution sociétale pour que ça matche entre les aspirations des uns et des autres dans la façon dont ils intègrent le travail dans leur vie et nous ce qu’on attend en tant qu’entreprise, pour que ces gens là puissent développer leur expertise au quotidien auprès de nos clients.

C’est important pour assurer la pérennisation de l’entreprise à terme.

 

Qu’attendez-vous aujourd’hui de vos managers ?

On est sur une structure qui est hiérarchiquement très courte. En dessous du niveau de la gouvernance il y a une couche de managers et ensuite il y a tous les ingénieurs et techniciens.
Je ne souhaitais pas avoir une structure trop lourde pour que l’information se diffuse naturellement et que les contacts directs se fasse au quotidien.

Nos managers on leur propose, presque par mimétisme, d’être en proximité de leurs propres équipes, de pouvoir mesurer les potentiels et talents des uns et des autres, de pouvoir accompagner d’autres sur des formations complémentaires pour qu’ils puissent continuer à grandir.
L’entreprise c’est un corps vivant, donc il faut que les uns et les autres s’y retrouvent, y compris dans leur propre évolution.

Donc ce qu’on demande à nos managers c’est d’être en très grande proximité avec leurs équipes et d’identifier la respiration de leurs équipes, pour continuer à faire en sorte que les gens s’y sentent bien et prennent du plaisir.

 

Avez-vous un secret personnel qui vous aide dans la conduite de votre entreprise ?

Pour être franc, je n’ai pas de secret personnel. J’ai de la chance, je renifle plutôt bien les situations, qu’elles soient internes ou externes.
Donc ce n’est pas vraiment un secret, c’est une exigence que j’ai vis-à-vis de moi-même, de ne pas me retrancher dans un rôle de manager derrière un PC ou derrière des tableaux Excel. C’est à des années lumières de ce que je suis, de mes points forts et de mes points faibles.
Donc je m’oblige à incarner cette proximité en externe avec les clients et en interne avec les équipes, parce que c’est là que je suis le plus fort et qu’en général je fais les bons choix.

 

Si vous deviez partir demain, qu’aimeriez-vous que les personnes de votre organisation disent de vous ?

Que j’étais un patron juste d’une part et un leader naturel, d’autre part.

 

Auriez-vous un conseil à donner aux dirigeants ?

Naturellement, et c’est un peu le risque dans le métier de dirigeant d’entreprise, c’est d’éviter une sorte de solitude.

Nous on a de la chance avec Gilles Renoult, on a une gouvernance à deux têtes, on a pas mal de recul et d’expérience, on est sur des rôles extrêmement complémentaires.
Et donc ce que je veux dire par là c’est que, au-delà de cette gouvernance à deux têtes, je m’efforce de partager les idées que je peux avoir, de sonder les idées que je peux avoir, de challenger les idées que je peux avoir, parce que le miroir est enrichissant.

Donc ce n’est pas vraiment un conseil mais c’est de dire ne restez pas cloisonné sur vos propres pensées uniquement. Partagez vos pensées, partagez vos réflexions, partagez vos business strategies.
Vous allez l’enrichir et vous sortirez plus fort lorsque vous allez déployer vos décisions au sein de l’organisation.

Mon conseil, c’est de ne pas rester seul.

 

Auriez-vous un mot de fin à nous partager ?

Pour être dirigeant, il faut aimer les Hommes, pour pouvoir créer du lien de confiance avec vos partenaires et vos clients, pour faire évoluer et grandir vos propres équipes. Je pense que c’est un élément clé.

Si vous aimez les gens avec lesquels vous travaillez dans votre environnement et que vous cherchez à créer du positif et construire du positif avec l’environnement, vous allez y arriver, c’est naturel.

 

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